Viscose et mode durable

Le faux ami de la mode éthique

Pour faire du shopping de manière responsable, vous devez d’abord apprendre à lire les étiquettes des vêtements. En effet, comprendre l’impact environnemental et social de chaque type de textile est central dans la mode écoresponsable.

Il existe deux grandes catégories de textile dans la mode :

  • Les textiles d’origine naturelle, comme le coton, le lin, la soie.
  • Les textiles d’origine synthétique et artificielle, tels que la viscose, le polyester ou le lyocell par exemple.

La plupart d’entre nous pense que les textiles naturels sont bons pour la planète et que les textiles synthétiques ne le sont pas. Ce n’est cependant pas si simple. D’une part, certains textiles naturels ont des conséquences directes et indirectes très néfastes sur l’environnement et sur les travailleurs. D’autre part, une bonne part des textiles synthétiques sont aussi d’origine naturelle. Ils demandent cependant un certain nombre de procédés chimiques pour être transformés.

Dans cette série d’articles sur les textiles naturels et synthétiques, Paullet va vous aider à distinguer les différents textiles et à comprendre quels sont les plus durables et responsables d’entre eux.

Dans cet article, Paullet va vous parler de la viscose et de la mode durable !

La viscose en quelques chiffres clés

  • Quantité de fibres naturelles pour obtenir 400 grammes de viscose : 1 kilogramme.
  • Premier pays exportateur : Indonésie.
  • Premiers pays producteur de produits finis : Chine, Inde et Bangladesh.
  • Part dans le textile mondial : 6,3% en 2020, soit le 3ème textile le plus produit au monde après le coton et le polyester.

La viscose, une matière textile artificielle d’origine naturelle

La viscose est une des matières textiles les plus utilisées dans le monde. Elle rentre dans la confection de beaucoup de nos vêtements : robes, chemises, doublures de vestes, jupes, pantalons… En effet, la viscose présente de nombreux avantages qui en fait une matière de choix pour l’industrie du textile.

Pour commencer, il faut savoir que la viscose est une matière artificielle dérivée de la cellulose de bois. C’est donc une fibre textile d’origine naturelle. Elle est conçue grâce à l’extraction de la pulpe végétale. De nombreux traitements chimiques et physique permettent ensuite de la transformer afin d’obtenir des filaments plus ou moins longs.

C’est un français, le comte Hilaire de Chardonnet, qui a inventé le procédé de transformation de la viscose en 1884. Il cherchait alors à obtenir une matière textile similaire à la soie. Son objectif était de la remplacer à moindre coût et de manière industrialisée. La soie, comme c’est toujours le cas aujourd’hui, mais dans une moindre mesure, est une matière très pébliscitée, mais coûteuse. Aujourd’hui elle pose aussi la question de la maltraitance animale. Les agriculteurs tuent en très grande majorité les larves afin de les extraire de leurs cocons de soie, sans en abîmer la précieuse fibre.

La viscose, que l’on appelle aussi « rayonne » ou « soie artificielle », a rencontré un succès immédiat dans le textile et l’habillement. Les fibres synthétiques dérivées du pétrôles commencent à la concurrencer à partir de 1938 seulement.

Les nombreux avantages de la viscose

La viscose est une fibre textile d’origine naturelle. Elle se présente ainsi souvent  comme une alternative écoresponsable aux matières synthétiques à base de pétrôle. Elle a aussi l’avantage d’être végane, ce qui n’est pas le cas de la soie. Viscose et mode durable seraient donc compatibles… 

La viscose présente également des avantages de coût par rapport aux matières d’origine naturelle, et par rapport à la soie en particulier, une matière encore coûteuse de nos jours.

Par ailleurs, la viscose est une fibre artificielle agréable à porter. C’est une matière légère et 50% plus absorbante que le coton. Elle laisse respirer la peau mieux que le coton. Elle remplace ainsi souvent le coton et la soie, en plus d’être beaucoup plus abordable en termes de prix.

La viscose est aussi rapide et simple à teindre. Il suffit, de manièresûrement très simplifiée, de la laver avec de la teinture dans de l’eau chaude pour que cette dernière tienne à long-terme.

De plus, la viscose est très résistante. Les vêtements fabriqués en viscose ne bougent pas : ils ne rétrécissent pas, ne se déchirent pas, etc.

Ainsi, pour toutes ces raisons, la viscose et la mode durable semblent liées. Cependant, comme c’est malheureusement souvent le cas avec l’industrie du textile, cette réalité n’est que le haut de l’iceberg. Elle cache en fait une vérité bien dramatique pour l’environnement. Mais aussi pour notre santé, et celle des personnes qui vivent dans les pays producteurs de viscose : la Chine, l’Inde et la Bangladesh.

Viscose et mode durable : destruction de l’environnement et drames sociaux et sanitaires…

La viscose contribue tout d’abord à faire pression sur la déforestation. Le secteur textile demeure malheureusement encore très opaque à ce sujet. Et oui, la viscose est constituée de celluloses de bois. De nombreuses organisations de lutte contre la déforestation accusent régulièrement les producteurs de viscose d’être en partie responsables de la destruction de la forêt en Indonésie et en Amazonie. La déforestation se traduit par l’implantation intensive de monocultures qui conduit à la destruction de l’habitat naturel de millions d’espèces vivantes.

Question destruction de l’environnement, la production de viscose consomme également énormément d’énergie et d’eau, nécessaires à son processus de transformation. De nombreux solvants chimiques très toxiques rentrent par ailleurs dans la confection de la viscose, comme lacide citrique, le sulfate de soude et les produits de teintures. Le disulfure de carbone est quant à lui un produit toxique inflammable et très volatile. Il cause une importante pollution de l’air.  

Dans les pays producteurs de viscose, le circuit de production a lieu très majoritairement en circuit ouvert. Il n’existe donc pas de traitement des eaux polluées et des déchets chimiques. Les usines les rejetent directement dans la nature et dans les cours d’eau. Les populations locales dépendent de ces mêmes cours d’eau pour arroser leurs champs (se nourrir), pour se laver et pour boire.  Il y a d’ailleurs un dicton chinois qui dit : « Si tu veux connaître la couleur à la mode cette saison, regarde donc la couleurs de l’eau« …

Les conséquences sur la santé des populations locales dans les pays producteurs de viscose (fibres et produits finis) sont totalement désastreuses. L’ensemble des produits chimiques toxiques rejetés par l’industrie textile sont directement responsables du développement de très lourds handicaps moteurs et mentaux. Le reportage télé d’Arté sur la fast fashion, Les Dessous de la mode à bas prix, est à ce titre terriblement édifiant. Il montre les handicaps et les maladies graves qui frappent la population locale, et qui se transmettent sur plusieurs générations…

Enfin, le travail de la viscose est aussi étroitement lié à la fast fashion. On retrouve effectivement énormément de vêtements en viscose dans les magasins de fast fashion. Or, la fast fashion est plus que montrée du doigt en ce qui concerne les conditions de travail désastreuses et inhumaines au sein des usines de confection, où travaillent prêt de 80% de femmes. Les ouviers du secteur textile font face à une rémunération dérisoire en-dessous du salaire minimum vital, à du travail forcé, à l’absence de protection sociale et sanitaire, à l’interdiction des syndicats, aux journées à rallonge, au chantage, aux intimidations, au harcèlement sexuel, aux viols en série…

Mais attention, le reste de l’industrie textile, et les marques plus haut de gamme notamment, ont également beaucoup recours à la viscose dans la confection de leurs collections. La fast fashion n’est donc pas le seule responsables des conséquences néfastes et multiples de la production de viscose.

En effet, la viscose a aussi des répercussions sur notre propre santé en tant que consommateurs. Faute d’information et de communication, nous avons tendance à croire que les vêtements que nous achetons sont exempts de produits chimiques nocifs. Ce n’est malheureusement pas le cas. Il reste effectivement des traces plus ou moins importantes de ces produits sur les vêtements que nous achetons en magasin… De plus, la viscose provoque une transpiration excessive. Les autorites sanitaires et les médecins déconseillent d’en porter lors des épisodes de fortes chaleurs ou pour faire du sport.

Viscose et mode durable : les alternatives écoresponsables à la viscose

Fort heureusement il existe, d’une part, des alternatives innovantes et écoresponsables à la viscose, et d’autre part, des médias engagés comme Paullet pour vous en parler !

Les principales alternatives existantes à la viscose sont assez récentes. Parmi elles, on trouve le lyocell, le modal et le Cupro.

En termes de production, ces nouveaux types de viscose sont beaucoup plus économes en eau et en énergie que la viscose standard. La fibre de viscose développée par le leader dans le domaine, Lenzing AG, est par exemple particulièrement exemplaire (Lenzing Modal®). Lenzing a réussi à réduire de 95% les besoins en énergie et en eau de la viscose. Plus encore, Lenzing a partagé une partie de ces pratiques avec l’ensemble de la filière. La viscose (ou le modal) développée par Lenzing a une empreinte carbone neutre.  Elle utilise vingt fois moins d’eau que le coton pour la même quantité de fibre produite.

De même, le lyocell, une fibre textile issue de la cellulose de bois (origines : Autriche, Allemagne et Nouvelle-Zélande), permet de réduire drastiquement la quantité d’eau et d’énergie nécessaire à sa transformation. Cette dernière se fait également en circuit fermé. L’eau est réutilisée à plus de 90%. Le processus de fabrication du lyocell est breveté et permet de recycler 99% de la soude caustique utilisée dans le processus chimique de fabrication. Pour le reste, le lyocell n’a recours qu’a des entrants naturelsLe Tencel®, marque déposée par le groupe Lenzing également, est fabriqué à partir de fibres d’eucalyptus issus de forêts gérées de manière durable, en Autriche notamment.

Le Cupro® quant à lui a une texture vraiment très proche de la soie, et un rendu très haut-de-gamme. Son processus de production est similaire à celui du lyocell et du modal.

Pour ce qui est de la viscose, vous l’aurez donc bien compris, privilégiez les alternatives écoresponsables pour l’achat neuf. La seconde-main reste évidemment la meilleure des options pour une mode plus durable.Mais seulement après les vêtements qui se trouvent déjà dans votre placard !

Pauline Collet, le 16 avril 2021.

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